S’il y a un truc qui m’énerve dans notre rapport à la langue écrite, c’est la façon dont on stigmatise le manquement à la règle.
« Vous avez fait une faute. » Comment vous sentez-vous avec cette affirmation ? Percevez-vous l’accusation ? Pour ma part, à chaque fois que j’entends ou lis cette phrase, je frémis.
Nous-mêmes sommes conditionnés : nous nous désolons de commettre des fautes d’orthographe, nous nous en excusons (bon, certains s’en moquent, mais ce sera l’objet d’un autre article.).
Hé oui, les mots traduisent nos croyances, et dans le cas qui nous occupe aujourd’hui, l’arrière-plan s’avère plutôt lourd ! Rien de plus brutal que cette dénomination de « faute ». Elle s’adosse à une culpabilisation, une notion religieuse toujours bien présente dans nos sociétés occidentales. Ainsi, lorsqu’ils sont confrontés aux apprentissages complexes des usages de l’écrit, les élèves s’essaient à l’exercice périlleux de la dictée. Et toujours, se pose la question : « combien de fautes ? », avec, en toile de fond, la honte d’avoir « mal fait », d’avoir « raté » et d’être nul. Comme le zéro que l’on pouvait récolter très facilement avec le système de notation injuste et terriblement sévère adopté par nombre d’enseignants.
Quant à la couleur adoptée par ces mêmes enseignants pour corriger… que penser de ce rouge agressif ? Certes, cela rend visible le problème, mais il existe d’autres couleurs, tout aussi repérables. Et bien moins stigmatisantes.
Il faut du courage à nombre d’entre nous pour se frotter à l’écrit après ces expériences choquantes.
Aussi, pendant les années passées à enseigner, j’ai toujours pris soin d’éviter ce terme de « faute ». Je lui ai préféré « l’erreur » et j’ai pris soin de corriger ( 😉) chaque adulte qui employait l’autre terme . Ce que je fais toujours, d’ailleurs.
Alors, à partir d’aujourd’hui, décidons d’adopter le terme d’erreur pour remplacer celui de faute. Notre rapport à l’écrit s’en trouvera allégé. Car une faute doit être pardonnée, alors qu’une erreur se corrige.
